Une approche intergénérationnelle
Un des défis pour avoir une
compréhension juste des FJ est son approche intergénérationnelle. C’est une de
nos valeurs centrales et une de nos caractéristiques distinctives. Mais cela
rend difficile de mettre notre ministère en boîte. Les FJ ne sont pas un
ministère pour les enfants, ou pour les adolescents, ou pour les jeunes, ni
même pour les familles… Nous croyons que cette approche intergénérationnelle
est une force et une dimension dans laquelle le Seigneur nous a appelés à être
pionniers.
James White définit une expérience
intergénérationnelle comme «deux groupes d’âge (ou plus) dans une communauté
religieuse qui apprennent/grandissent/vivent leur foi ensemble à travers des
expériences communes, un apprentissage en parallèle, des occasions de contribution
et un partage interactif.»[1]
Notre société aime étiqueter les choses ou les mettre en
boîte pour généraliser et définir (et par conséquent réduire) leur valeur. Mais
il y a de la puissance dans l’unité.[2]
Réunir les générations ensemble dans l’unité pour aimer Dieu, écouter sa voix
et lui obéir radicalement, c’est là tout les FJ. C’est plus difficile, cela
peut être moins attractif pour certains qui ne souhaitent être qu’avec leurs
pairs sans trop d’adultes ou de petits enfants autour d’eux, mais Dieu a béni
cette approche générationnelle.
Nous la comparons à une flèche: les enfants et les
adolescents représentent la pointe, les adultes la hampe et la génération plus
âgée les plumes. Cette image se base sur les passages de Joël 3:1 et d’Actes
2:17: «Après cela, je
déverserai mon Esprit sur tout être humain; vos fils et vos filles prophétiseront, vos vieillards auront des rêves, et vos jeunes gens des visions.» Chaque
génération manifeste l’onction de Dieu différemment et le fait de les réunir
est quelque chose de puissant! Les enfants et les adolescents ont cette onction
prophétique et jouent un rôle majeur, mais pas tous seuls, séparés ou
déconnectés des autres générations.
Bien sûr, le fait de garder les gens en classes d’âge est
plus facile. Nous pouvons être plus pointus et efficaces dans l’évangélisation
et dans certains aspects du discipulat. C’est moins désordonné et beaucoup plus
simple à organiser. Mais que construisons-nous sur le long terme? La journaliste
Mary Pipher offre ce regard sur ces questions liées au phénomène de la
séparation des âges.
Une bonne partie des maladies sociales de l’Amérique
proviennent de la ségrégation des âges. Si dix ados de quatorze ans sont
réunis, il vont former une culture du style Sa
majesté des mouches avec sa compétition et sa méchanceté. Mais si dix
personnes entre deux et quatre-vingts ans sont réunies, elles vont tomber dans
une hiérarchie des âges naturelle qui les encourage et les enseigne tous. Pour
notre propre santé mentale et sociale, nous devons reconnecter les générations.[3]
Mark de Vries, dans son ouvrage
Family-based Youth Ministry, note
cette intéressante observation quant à notre capacité d’amener les jeunes à la
maturité à travers l’approche traditionnelle du groupe de jeunes. Il décrit le
cheminement de Jenny, qui était très enthousiaste et impliquée avec le Seigneur
en tant qu’adolescente, mais qui quelques années plus tard n’était plus active
dans aucune église et s’était détournée de Dieu:
… notre programme avait réussi à la conduire à devenir une adolescente chrétienne mature, mais
quelque part échoué à la placer sur les bons rails vers une vie chrétienne adulte mature. Nous avions une vision à
court-terme, ne nous concentrant que sur l’objectif de la garder impliquée et
en croissance, mais oubliant l’objectif à long-terme de poser une fondement qui
allait durer.[4]
De Vries souligne le besoin
pour des adolescents d’être connecté aux autres générations, en particulier
celle des adultes.
Le pont de l’enfance à l’âge
adulte est de plus en plus long. Les jeunes gens de notre époque sont coincés
dans une culture centrée sur leurs pairs. Et à moins qu’ils ne puissent trouver
un appui pour sortir de cette culture, ils vont rester perpétuellement coincés
dans l’adolescence. […] Les
adolescents n’apprendront pas les aptitudes requises pour devenir des adultes
matures dans un groupe de jeunes centré sur ses pairs. Ils n’apprendront pas
ces aptitudes en discutant avec leurs copains. Le processus se produit alors
que le moins mature a régulièrement l’opportunité d’observer, de dialoguer et
de collaborer avec le plus mature. En refusant aux adolescents des opportunités
pour ce genre d’implications avec des adultes, notre culture envoie de nombreux
jeunes dans la vie adulte sans préparation relationnelle, mentale et morale
pour les défis de la vie adulte. […] La culture des pairs horizontale
n’est pas suffisante. Lorsque la structure verticale connectant les enfants aux
adultes est érodée, est-il vraiment surprenant de voir nos enfants grandir en
ayant des difficultés à établir des valeurs solides qui leur sont propres? […] La propre culture des jeunes les maintient
souvent piégés dans cette immaturité, en les formant pour être des victimes
réactives plutôt que des chrétiens proactifs.[5]
Il conclut:
La culture
jeune, comme la plupart des ministères auprès des jeunes, est fondamentalement
une structure qui rend orphelin. Elle ne porte pas ses membres tout au long de
la vie; elle les rend plutôt orphelins au moment-même où ils ont le plus besoin
d’une culture stable. L’isolation des adolescents du monde des adultes a
sérieusement freiné les processus qui peuvent les conduire dans une vie adulte
mature. L’établissement de structures qui accompagnent et portent les jeunes
dans la vie adulte doit devenir l’accent principal des ministères auprès des
jeunes dans la prochaine génération.[6]
Cela ne veut pas dire que les
FJ font toujours toutes les activités tous ensemble. Nos avons découvert qu’il n’est
pas si facile de recevoir un enseignement ensemble; le fait de se mettre en
classes d’âge et de recevoir un apport approprié à son âge est totalement
pertinent. Mais il y a tant de choses que nous pouvons faire ensemble, en
particulier quand on en vient à servir les autres. Peter Menconi écrit:
Un des meilleurs moyens pour de
multiples générations au sein d’une église de développer des relations est de
se tourner vers l’extérieur et de servir les autres. Lorsque les diverses
générations se mettent au service des autres ensemble, l’accent n’est plus sur
leurs différences, mais sur leur coopération, qui touche et interpelle les gens.[7]
Dans leur ouvrage Intergenerational Christian Formation,
Allen et Ross soulignent que les voyages missionnaires intergénérationnels ont,
par exemple, plusieurs avantages:
- Réunir des gens avec différentes expériences améliore la capacité de
servir les besoins locaux comme les besoins des membres de l’équipe de manière
adéquate.
- Réunir les générations augmente le potentiel d’avoir une largeur de
maturité dans la foi, à partir de laquelle tous peuvent apprendre quelque chose.
- Les jeunes stimulent les adultes et, en contrepartie, les adultes aident
les jeunes en les aidant à concentrer leur énergie.[8]
Peter Menconi ajoute:
Les voyages missionnaires à
court-terme constituent l’un des moyens les plus rapides de bâtir des relations
solides et durables entre les générations. Lorsqu’un groupe intergénérationnel
est réuni dans un environnement neutre – et souvent inconfortable, les
conversations sont plus facilement initiées. Les voyages missionnaires
permettent de merveilleux moments enseignables tant pour les adultes que pour
les jeunes et les enfants.[9]
Allen et Ross concluent:
Dans de tels moments, les gens ont tendance à s’accrocher
à Christ et les uns aux autres. C’est non seulement bon pour les adultes de
voir la foi des enfants en action, mais c’est aussi bon pour la jeune
génération de voir les adultes défiés et vulnérables. En particulier après
plusieurs jours dans une nouvelle culture à faire des tâches inhabituelles, les
gens tendent à devenir plus authentiques. Quand cela se produit, les gens sont
souvent plus ouverts à l’œuvre de l’Esprit de Dieu. D’une manière ou d’une
autre, le Saint-Esprit travaille à travers les membres de l’équipe pour se
soutenir et s’encourager les uns les autres. La prière et les partages sur la
foi deviennent souvent plus pointus et libres que lors d’un culte typique du
dimanche matin ou d’une réunion de comité. Cette ouverture peut bâtir un sens
de communauté qui peut être apporté dans la communauté de foi plus large et
transmettre le virus aux autres. Des relations profondes entre des gens de
diverses générations peuvent servir à combler le fossé générationnel, soulager
l’âgisme et permettre aux jeunes de se percevoir comme faisant partie de
l’église plutôt que seulement du groupe de jeunes.[10]
[1]. James W. White, Intergenerational
Religious Education: Models, Theories and Prescription for Interage life and
Learning in the Faith Community (Birmingham, AL: Religious Education Press,
1988), p. 18.
[2]. Psaume 133.
[3]. Mary Pipher, «The New Generation Gap,» USA Weekend, 19-21 mars 1999, p. 12.
[4]. Mark de Vries, Family-based
Youth Ministry (Downer Groves, IL: InterVarsity Press, 1994), pp. 24-25.
[5]. Ibid., pp. 48-49, 53, 54.
[6]. Ibid., p. 56.
[7]. Peter Menconi, The
Intergenerational Church: From WWII to www.com (Littleton, CO: Mt. Sage
Publishing, 2010), p. 207.
[8]. Holly Caterton Allen et Christine Lawton Ross, Intergenerational
Christian Formation: Bringing the Whole Church Together in Ministry, Community
and Worship (Downer Grove,
IL: InterVarsity Press, 2012), p. 231.
[9]. Menconi, The Intergenerational Church, p.
209.
[10]. Allen and Ross, Intergenerational Christian Formation, p. 233.
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