lundi 18 décembre 2017

Thèse de Guy 13


III. L’époque moderne – Amener les enfants à expérimenter Dieu

Les petits prophètes des Cévennes

En France, après la révocation de l’Edit de Nantes (1685), le protestantisme a été interdit et persécuté. Quelques années plus tôt, en 1673, Isabeau Vincent est née dans une famille protestante du Dauphiné. Son père était un chrétien nominal et sa mère une forte croyante, mais elle est décédée quand Isabeau avait huit ans. Son père s’est alors converti au catholicisme pour de l’argent et la sécurité; il battait souvent sa fille, la forçant à aller à la messe et il a fini par la vendre à un homme qui l’a employée comme bergère. En 1688, alors qu’elle dormait une nuit, elle a commencé à parler et à pleurer pendant son sommeil. Les gens autour d’elle ont tenté de la réveiller, mais c’était impossible. En fait, elle s’est mise à prophétiser et, le phénomène se répétant pendant plusieurs nuits, les gens ont commencé à venir l’écouter. Pierre Jurieu, un théologien de l’époque, a écrit qu’«elle prononçait des paroles divines et excellentes.» Pendant les premières semaines, elle parlait en dialecte, car elle n’avait jamais appris le français, mais quand ses prophéties ont commencé à être données en vrai français, les gens ont été de plus en plus étonnés. Cet événement a déclenché le début d’un mouvement prophétique dans le sud de la France dans lequel les enfants ont joué un rôle majeur. L’historien Pierre Demaude explique:  

Un soir, pendant son sommeil, elle entonna un chant. Ensuite, ce fut un culte qu’elle présida dans cet état. … Elle priait, récitait des passages entiers des Écritures dont elle se servait pour prêcher. Elle ne le faisait pas comme les pasteurs qui avaient leurs prédications préparées et qui suivaient de manière très stricte les textes. Elle parlait d’abondance, ce qui ne se faisait pas à l’époque, avec beaucoup de bon sens et d’à-propos.[1]

Isabeau était une fille simple, sans éducation et avec des facultés intellectuelles limitées. Pourtant, ses auditeurs ont remarqué que son intelligence s’ouvrait de plus en plus. Les visitations de l’Esprit la transformaient, lui donnant de nouvelles capacités. Quatre mois plus tard, elle a été arrêtée et interrogée. A la surprise générale, elle a répondu avec patience, point après point, en vrai français. Elle n’était ni intimidée, ni effrayée. Elle a même eu l’audace de dire que si on la faisait taire, Dieu lèverait une armée de prophètes qui prendraient sa place. Cette prédiction allait rapidement se révéler vraie.

Quelques jours après son arrestation, un garçon de huit ans a commencé à prophétiser. Ses parents ont tenté de le cacher, mais pas pour longtemps.[2] Le mouvement des «petits prophètes» avait commencé et il s’est répandu dans le Vivarais, au sud de la France, en 1689. Il allait durer près de vingt ans, et serait finalement réprimé sévèrement par l’église catholique, et même désapprouvé par de nombreux pasteurs protestants opposés à toute manifestation charismatique. Des adolescents illettrés, des enfants, même des bébés au berceau se sont mis à prophétiser, appelant les gens à se réunir dans des lieux secrets où les soldats du roi Louis XIV ne les trouveraient pas, à se repentir, à revenir aux Ecritures… Maximillien Misson,[3] un réfugié huguenot français à Londres, a écrit ces témoignages et l’histoire de cette époque (appelée le Désert) en 1707 dans son ouvrage étonnant Le théâtre sacré des Cévennes.


[1]. Pierre Demaude, Les origines du réveil des Cévennes (1685-1704), 2013, consulté le 15 novembre 2014, http://reveille-toi.net/wordpress/?p=2532.
[2]. Toute cette section est adaptée de Pierre Demaude, Les origines du réveil des Cévennes (1685-1704).
[3]. Maximillien Misson, Le théâtre sacré des Cévennes (Nîmes, France: Editions Alcide, 2011, première édition 1707).

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