lundi 26 janvier 2015

Héros de la foi en Francophonie - 12 - François Coillard


François Coillard: Le «Livingstone français»
François Coillard est né en 1834 dans une vieille famille huguenote à Bourges, cadet d'une famille de huit enfants. Il avait deux ans lorsque son père mourut. Il eut une enfance très pauvre, marquée par la piété de sa mère surnommée au village «la mère Bonté». Il eut comme pasteur Ami Bost, l’un des promoteurs du Réveil évangélique de Genève au début du XIXème siècle. Son enfance et sa jeunesse furent nourries par la piété du Réveil, dont il conserva l’héritage toute sa vie. 
François commença à travailler très jeune comme aide-jardinier, puis reçut une bourse pour aller étudier à l’Institut protestant de Glay (Doubs). Il passa par un temps de crise, pendant lequel il fut maladivement écrasé par le sentiment de sa culpabilité, puis connut une conversion dont il sortit transformé.
Convaincu que Dieu l’appelait à son service en Afrique, François se présenta en 1852 – il avait 18 ans – au comité de la Mission de Paris qui l’incita à compléter ses études. Il suivit sans grand succès les cours de la Faculté de théologie de Strasbourg et entra en 1856 à la Maison des Mission de Paris dont le directeur était Eugène Casalis, récemment renter du Basutoland. En mai 1857, François fut consacré pasteur et il s’embarqua pour l’Afrique la même année, à l’âge de 23 ans.
François Coillard arrive au Cap le 6 novembre 1857, et il part aussitôt pour le Basutoland. En approchant du pays, il trouve toutes les stations missionnaires pillées et incendiées, la région étant ravagée par le conflit armé qui venait d'éclater entre le Basutoland et les Boers de l'Etat Libre d'Orange. Il arrive finalement le 8 mai 1858 à Thaba-Bossiou, la capitale du Basutoland, qui avait résisté aux assauts des Boers.
La conférence missionnaire décide quelque temps après d'ouvrir deux nouvelles stations missionnaires, Bethléem et Leribe, cette dernière étant confiée à François. Malgré la crainte de prendre en charge tout seul une station éloignée, Coillard accepte cette décision et arrive à Leribe en février 1859.
À son arrivée dans cette région excentrée du Lesotho, François est bien accueilli par Malopo, un des fils du roi, bien que celui-ci, après s'être converti au christianisme et avoir été baptisé, soit retourné vers les coutumes païennes (il n'avait, par exemple, pas moins de quarante ou cinquante femmes). Coillard doit faire œuvre de pionnier et, pendant plus d'un an, il va consacrer une grande partie de son temps à des travaux de construction, de sa chaumière d'abord puis d'une chapelle provisoire. Comme il vit seul, il doit aussi s'occuper de toutes les affaires du ménage, de la cuisine et même de la confection de ses vêtements. Il n'oublie cependant pas ce pour quoi il est venu en Afrique et il annonce l'évangile lors de réunions festives ou dans la chapelle qui réunit une centaine d'adultes aux cultes du dimanche. En contact permanent avec les Bassoutos, il apprend aussi rapidement leur langue.
Deux ans après son arrivée il va cependant trouver la compagne qui lui manquait en Cristina Mackintosh, une jeune Écossaise; de 5 ans son aînée, elle va lui permettre de murir et de consolider son ministère.
En janvier 1861 il se rend au Cap pour l’accueillir. Le mariage a lieu dans cette ville en février puis le couple retourne à Leribe où ils créèrent une école qui ne s'interrompait que le samedi, tout en parcourant le pays à cheval pour évangéliser le pays. Les résultats ne furent pas rapides mais en août 1862 ils eurent la joie de baptiser les deux premiers Bassoutos de Leribe.
Malgré les efforts de conciliation menés par Coillard, la guerre éclata entre l’Etat Libre d’Orange et les Bassouto, avec son cortège de massacres, de villages brûlés, de troupeaux pillés, de réfugiés fuyant pour leur vie, et ceci en plein hiver et dans la neige. En mars 1866, François et Cristina Coillard se replièrent dans la colonie anglaise du Natal, plus à l’est. Ils ne purent revenir à Leribe que 3 ans plus tard, en 1869. L’Eglise, sans être très nombreuse, vivait toujours dans l’élan du Réveil, et 32 candidats s’annoncèrent d’emblée pour le baptême. Deux ans plus tard, l’inauguration d’un nouveau temple fut l’occasion de baptiser 50 croyants de Leribe et des villages voisins.
François et Cristina restèrent plus de 20 ans à Leribe, qui devint leur patrie d’adoption. Il écrivit des fables dans la langue locale qu’il maîtrisait comme sa langue maternelle, et elles restèrent des classiques dans l’éducation et la culture du pays.
Alors qu’il formait le projet de prendre un conge en Europe, ses collègues le sollicitèrent pour prendre la tête d’une expédition en direction du Nord Transvaal afin d’atteindre des région jamais encore touches par l’Evangile. En 1877, à 43 ans, François entra dans une nouvelle étape de sa carrière missionnaire. Elle fut faite d’incessantes expéditions, jusqu’à la fondation de la mission du Zambèze. Il partit, accompagné de son épouse, de sa nièce et de 4 évangélistes avec leur famille. Après un an et demi de péripéties et d’errances, la caravane parvint sur les bords du Zambèze. Cette première expédition dura 2 ans et demi.
En 1880, les Coillard rentrèrent à Paris, où ils restèrent 2 ans, pour plaider la cause du Zambèze. Ils visitèrent les églises de France, de Suisse, de Belgique, des Pays-Bas, d’Ecosse ainsi que les églises vaudoises du Piémont. Sa réputation d’explorateur le précédait, et François se désolait qu’on veuille l’entendre parler davantage de voyages et d’aventures que de l’évangélisation de l’Afrique. Le financement nécessaire fut finalement trouvé, mais Coillard était tout de même déçu: le protestantisme français ne soutint pas unanimement le projet du Zambèze, le trouvant trop ambitieux, coûteux et irréaliste. Il ne repartira qu’avec une seule recrue.
En 1884, il pourra quitter Leribe avec une grande caravane de 5 «wagons» de 4 mètres de long, tirés par 12 à 18 boeufs, suivis d’un troupeau de chèvres, de vaches et de moutons et plus de 30 personnes. Ils durent affronter la maladie, les attaques des rois locaux, la faim et même la révolte de certains accompagnateurs. Ils mirent une année pour arriver au Zambèze.
Pendant deux ans, François noue des contacts diplomatiques avec le roi du pays, mais ce n’est qu’en 1886 qu’il peut enfin parvenir dans la capitale, Séchéké. Il obtient l’autorisation de s’établir dans un village, Séfoula, à 300km plus au nord. Les conditions de vie sont difficiles, et même si de nouvelles recrues les rejoignent, la santé des missionnaires est ébranlée et l’un d’eux meurt, il y a peu de conversions profondes. Les années qui suivirent furent encore plus éprouvantes en raison du climat insalubre. Plusieurs missionnaires tombèrent malades et certains moururent des fièvres. C'est ainsi que disparut Christina Coillard le 28 octobre 1891 après plusieurs années de souffrance.
Malgré la perte de celle qui avait été son principal soutien, François Coillard poursuivra seul, n'hésitant pas à parcourir la région en pirogue ou à cheval pour annoncer l'évangile. Il poursuivit aussi sa politique d'ouverture de stations missionnaires le long du Zambèze, dispersant ainsi peut-être de faibles moyens qui eussent été plus efficaces s'ils étaient restés groupés. Mais en 1896, sa santé déclinant, il fut décidé de le renvoyer immédiatement en France. Il y séjournera 2 ans.
De retour au Cap fin 1898, il reprit la route du Barotseland accompagné des quinze nouveaux missionnaires. Pendant l’absence de François Coillard la mission de Leribé s’était développée et avait même ouvert deux nouvelles stations missionnaires. L’accession au pouvoir d’un nouveau premier ministre chrétien laissait espérer un avenir radieux.
François Coillard fut cependant plus profondément secoué par le mouvement de contestation que déclencha parmi les chrétiens africains un de ses proches collaborateurs du Lesotho, Willie Mokalapa. Certains évangélistes indigènes supportaient en effet de plus en plus mal le paternalisme ambiant des missionnaires qui les reléguaient au second plan, malgré des compétences et une foi indéniables. Ils ne pouvaient donc qu’être séduits par les idées véhiculées alors dans toute l’Afrique du Sud par les églises dites «éthiopiennes», un mouvement qui prônait la constitution d’églises indigènes indépendantes des missions étrangères.
François Coillard ne comprit pas ce mouvement et s’opposa à l'installation des «Ethiopiens» là où il y avait déjà une mission. Il y eut des troubles dans l’école biblique de Léalui et le roi Lewanika soutint le mouvement. Il finit cependant par céder à Coillard qui réussit à rétablir la situation, d’autant plus facilement d’ailleurs que le mouvement ne fut que de courte durée.
Tous ces problèmes n’avaient fait qu’aggraver la santé d’un homme souffrant depuis longtemps d’hématurie François Coillard mourut d’une dernière crise à Lealui (Rhodésie du Nord) le 27 mai 1904 et fut enterré le jour même auprès de sa femme à Sefula comme il l'espérait.
François Coillard était très connu en Europe et son décès donna lieu à de nombreux articles, en Afrique du Sud, en Angleterre et en France où le Figaro titra même: «La mort du Livingstone français»; la publication d’une biographie monumentale par Edouard Favre ne fit d’ailleurs qu’accroître cette réputation dans les milieux protestants.

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