Henry Dunant: Le fondateur de la Croix-Rouge
Henry Dunant, né en 1828 à Genève
et mort en 1910
à Heiden, est un homme
d'affaire humaniste suisse,
également un chrétien protestant. Il a fondé la Croix-Rouge. Henry Dunant est
le fils aîné de cinq frères et sœurs. Ses parents, appartenant à la bourgeoisie
moyenne, disposent d'une influence dans la ville et s'engagent dans l'action
sociale: son père est membre du Conseil de la ville et se préoccupe du sort des
orphelins
et des anciens criminels alors que sa mère travaille dans le secteur de la
bienfaisance - en particulier pour les pauvres et les malades.
Les
activités de bienfaisance des parents influent sur l'éducation de leurs enfants:
la responsabilité sociale est très tôt inculquée à Henry. À l'âge de six ans,
il part avec toute sa famille à la découverte de la mer Méditerranée, ce voyage
permet également au père de contrôler les conditions de détention des
prisonniers incarcérés à Toulon. Le petit Henry accompagne son père lors de ces
visites; doté d’une grande sensibilité, il est choqué et horrifié.
A
peine âgé de vingt ans, «il passe des dimanches après-midi à faire la lecture
de la Bible à des condamnés de la prison de Genève. (...) Le jeune homme a beau
ne pas être pasteur, son engagement charitable ressemble furieusement à un
ministère. Pour lui, l'amour du Christ se traduit très concrètement par l'amour
du prochain». Depuis quelques années en effet, il fréquente les cultes de la
Société évangélique à la Chapelle de l'Oratoire (future Eglise libre de
Genève). Touché par l'esprit du Réveil, il avait passé vers l'âge de quinze ans
par une conversion personnelle qui dynamisa sa foi. En 1852, il fonde un groupe
genevois qui formera le noyau de l’Union Chrétienne de Jeunes Gens (YMCA)
fondée trois ans plus tard à Paris et dont la charte sera rédigée par Dunant. Sur la base
de ses mauvaises notes, il quitte précocement le Collège
Calvin et débute en 1849 une formation de trois ans dans une banque. Au terme de
sa formation, il devient employé de banque mais
reste actif sur le plan social. En même temps, il est secrétaire de
l'Alliance évangélique de Genève.
En
1853, il voyage en Afrique du Nord, écrit son premier ouvrage et fonde une
société en Algérie. Il prend la nationalité française pour obtenir plus
facilement des concessions agricoles pour sa société. Pour ce faire, il décide
de s’adresser directement à l’empereur Napoléon III, alors en guerre contre les
Autrichiens et arrêté avec son armée à Solferino, près du lac de Garde en
Italie du Nord.
C'est
au soir du 24 juin 1859 que Dunant arrive à
proximité du champ de bataille de Solferino après la fin des combats. Environ
38’000 blessés et morts se trouvent encore sur le champ de bataille sans que
quelqu'un ne leur prête assistance. Ce que Dunant voit l'ébranle profondément
et il organise alors spontanément avec des volontaires de la population civile
locale la prise en charge des soldats blessés et des malades. Dans la ville
voisine, il met en place un hôpital dans la plus grande église du lieu. Environ 500 des quelque 10’000
blessés y sont conduits; ils distribuent aussi des traités
évangéliques, ce qui les conduit pour quelques jours en prison...
Comme
il le constate rapidement, presque tout vient à manquer: du personnel, des
connaissances techniques, du matériel médical et de la nourriture. Dunant et
ceux qui répondent à ses appels successifs ne font pas de différence entre les
nationalités des soldats. Les femmes du village trouvent une phrase devenue
célèbre pour justifier ce choix: «Tutti fratelli» (tous frères). Dunant réussit
en outre à obtenir des Français que les médecins autrichiens faits prisonniers
puissent aider à la prise en charge des blessés. Il met en place d'autres
hôpitaux et fait venir du matériel à ses frais. Malgré cette aide, beaucoup de
blessés viennent à mourir.
Trois
ans après sa visite auprès de Napoléon à Solferino, les blessures, les
hurlements d'agonie et les odeurs nauséabondes hantent son esprit. Il ne
parvient pas à les oublier, ce qui le pousse à écrire ce qu'il a vécu. Son
livre, Un souvenir de Solferino paraît en 1862; il décrit la
victoire de Napoléon mais fait découvrir aussi les aspects négatifs de cette
victoire: les soldats battus à mort et les blessés aux agonies sans fin. Cette
expérience est décisive pour Dunant, l'accumulation des soldats blessés étant
pour lui indescriptible. Il développe l'idée que les souffrances des soldats
pourraient être réduites à l'avenir. Dans tous les pays, des organisations
humanitaires, fondées sur la neutralité et le volontariat, devraient être autorisées à
soigner les blessés en cas de guerre:
un
militaire hors de combat à cause de ses blessures cesse d'être un ennemi et
doit désormais être considéré comme un être humain qui a besoin d'aide;
les
médecins et les infirmiers pourront donner leurs soins sans crainte d'être
capturés. Ainsi ils ne seront pas forcés d'abandonner leurs blessés en cas de percée
adverse.
En
septembre 1862,
il fait imprimer le livre à ses propres frais et distribue les 1600 exemplaires
à un grand nombre de personnalités politiques et militaires de toute l'Europe. Par la
suite, Dunant effectue des voyages à travers le continent
pour répandre son idée. Ce livre est reçu presque unanimement de façon
positive, avec intérêt et enthousiasme, alors que Dunant reçoit reconnaissance
et sympathie.
Le
président de la Société d'utilité publique genevoise, le juriste Gustave
Moynier, fait de ce livre et des idées de Dunant le thème de
l'assemblée des membres de la Société genevoise d'utilité publique tenue le 9 février 1863. Les propositions de
Dunant sont examinées et considérées comme valables et réalisables par les
divers membres. Dunant lui-même est nommé membre d'une commission qui comprend
également Moynier, le général Dufour et d’autres. Pendant sa première réunion
le 17 février,
ils décident de transformer la commission en organe permanent, appelé le Comité
des Cinq ou Comité de Genève. Ce jour est depuis considéré comme la date de
création du Comité international de secours aux militaires blessés en campagne,
désigné dès 1863
sous le nom de Comité international de la
Croix-Rouge. Dufour en devient le premier président avec Moynier
comme vice-président et Dunant comme secrétaire du comité.
Du 8
au 22 août 1864 a lieu, sur une
invitation du Conseil fédéral suisse, une conférence
diplomatique dans le cadre de laquelle, le 22 août,
la première convention de Genève qui établit
la Croix-Rouge
internationale de manière permanente est signée par les représentants de douze
États.
L'année
1865 est marquée en Algérie
par une série d'événements catastrophiques: des révoltes,
une épidémie
de choléra,
une invasion de sauterelles, des séismes, une sécheresse
et un hiver
inhabituellement rigoureux. Pour toutes ces raisons, mais aussi - pour une part
significative - parce qu'il a jusque-là négligé ses affaires pour promouvoir
ses idées, la situation financière de Dunant s'aggrave sensiblement. Il se
trouve contraint d'annoncer la faillite de sa société
alors que sa famille et des amis sont également impliqués dans ses entreprises
de par leurs investissements. Le 17 août,
il est condamné pour faillite frauduleuse. En raison des contraintes sociales
de l'époque, ce crash économique conduit à des demandes de retrait du comité
international. Le 25 août, il démissionne de son poste de secrétaire du comité
et se trouve complètement exclu de celui-ci le 8 septembre.
Cela faisait un certain temps que les relations se
détérioraient. Dunant était un visionnaire, ressenti souvent comme un utopiste.
Grisé peut-être par ses succès auprès des plus hautes personnalités
européennes, son individualisme a fini par irriter les autres membres du
Comité.
La
mère de Dunant meurt le 2 février 1868. Au cours de l'année,
il est aussi exclu de la YMCA. Dès mars 1867, il avait quitté Genève
qu'il ne reverra plus après son rejet par la société genevoise succédant à sa
condamnation judiciaire. Dunant part s'établir à Paris où il vit dans des
conditions très modestes. Il tente toutefois de propager à nouveau ses idées.
En 1872, Dunant tente, à travers un voyage en Angleterre,
de gagner des soutiens pour l'organisation d'une conférence internationale à
propos de la question des prisonniers de guerre. Il tient des discours devant
les membres de la Social Science Association dont les objectifs sont
comparables à ceux de l'Alliance générale pour l'ordre et la civilisation.
Durant son discours à Plymouth, il connaît un malaise en raison d'une accumulation de
fatigue. En raison de l'engagement pour ses idées, ses affaires personnelles
sont négligées et il s'endette encore plus, ce qui pousse son entourage à
l'éviter. Même le mouvement de la Croix-Rouge,
qui s'est étendu plus encore par la fondation de sociétés nationales dans
nombre de pays, l'a presque oublié.
La
guerre franco-allemande et la vie politique française après la fondation de la Troisième République constituent un autre
tournant dans la vie de Dunant. Il se retire encore plus de la vie publique et
développe une timidité prononcée qui marquera de façon décisive son
comportement jusqu'à la fin de sa vie.
Entre
1874 et 1886, il poursuit une vie
en solitaire, dans la misère matérielle, vivant notamment à Stuttgart,
Rome, Corfou, Bâle
et Karlsruhe.
Peu de détails de sa vie durant cette période sont connus. Mais le soutien
financier de divers amis ainsi que des activités occasionnelles, où des
connaissances et des garants lui permettent d'engranger de petits gains,
l'empêchent de sombrer.
En 1881, il se rend pour la
première fois en compagnie d'amis de Stuttgart au Biedermeierdorf situé
au-dessus de la ville de Heiden dans le canton d'Appenzell Rhodes-Extérieures. À partir de 1887, alors qu'il vit à Londres,
il reçoit une petite aide financière mensuelle de ses partisans. Puisque celui-ci
possède un style de vie certes modeste mais sans tomber dans la pauvreté, il
parvient à s'installer définitivement en juillet de la même année dans l'hôtel Paradies de la famille Stähelin situé à Heiden. Il se retire alors
complètement au cours des années suivantes et laisse de plus en plus la place,
au soir de sa vie, à des pensées mystiques et des visions
prophétiques.
En
1895, suite à un article dans un journal allemande, il est à nouveau sur le
devant de la scène; il reçoit des marques de sympathie et de reconnaissance de
toute l’Europe.
En 1901, Dunant reçoit le
premier prix Nobel de la paix pour la fondation de
la Croix-Rouge
internationale et l'initiation de la première convention de Genève. Les
félicitations, qui lui sont communiquées officiellement à l'occasion de
l'attribution du prix signifient pour lui une réhabilitation tardive, 34 ans
après les faits.
Il passe les dernières années de sa vie à l'hôpital de
Heiden où il tombe dans la
dépression et la crainte d'être poursuivi
par ses créanciers. Bien qu'il se voie encore lié à la foi chrétienne,
il s'éloigne aussi bien du calvinisme que d'autres formes de religion organisée et
dédaigne toute institution religieuse durant ses dernières années. Il s'éteint
dans la soirée du 30 octobre 1910 aux environs de
22h00.
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